Archive d’étiquettes pour : géopolitique

Mettre fin au processus d’adhésion de la Turquie

Intervention en séance plénière du Parlement européen sur la #Turquie. L’Europe doit sortir du déni ; et cela commence par mettre fin maintenant à ce processus d’adhésion, qui n’est qu’une fiction absurde.

Publiée par François-Xavier Bellamy sur Jeudi 9 juillet 2020

Relation UE-Chine : il est temps de sortir de la naïveté.

« Dès le 28 décembre, le docteur Li Wenliang alertait sur l’apparition d’un nouveau virus dans son hôpital. Pour toute réponse, le gouvernement chinois l’a arrêté et forcé à signer une confession publique. 

Dès la deuxième semaine de janvier, des responsables de l’OMS se sont plaints que la Chine ne transmette pas d’information sur le virus, et retienne des données cruciales pour mesurer sa dangerosité et éviter sa propagation. Des journalistes étrangers ont été expulsés du pays pour avoir évoqué l’épidémie en train de se développer. 

Une leçon pour nous, dans cette période où nos pays occidentaux perdent eux aussi le goût de la liberté d’expression : la capacité à supporter des opinions divergentes est nécessaire si nous ne voulons pas sombrer dans une société d’oppression, mais aussi si nous voulons garder le moyen d’être informés des dangers qui nous menacent. Une démocratie vivante et courageuse protège mieux qu’une dictature qui étouffe toute possibilité d’alerte. 

Si la Chine n’avait pas été un régime totalitaire, si elle avait respecté la liberté d’expression et avait tiré de ces alertes des réponses immédiates pour protéger sa population et prévenir le reste du monde, nous aurions très probablement pu éviter les dizaines de milliers de morts créées par cette pandémie, et la crise économique dévastatrice dont nos pays vont devoir payer les conséquences pour de nombreuses années sans doute. Le parti communiste chinois est directement responsable de ce désastre. 

Cette crise ne conduit pourtant pas le régime chinois à se remettre en question, bien au contraire : il a redoublé ses actions de propagande, y compris dans des pays européens. Il a multiplié avec une espèce d’opportunisme financier les actions dirigées vers des actifs économiques européens… 

Et enfin, nous le voyons aujourd’hui, il a intensifié sa répression, y compris à Hong Kong : il y a quelques jours, le 28 mai, l’Assemblée populaire de Chine a commencé la rédaction d’un projet de loi pour restreindre toutes les libertés des citoyens à Hong Kong. Les services de sécurité chinois pourraient y établir leurs antennes, l’opposition à la politique du gouvernement chinois pourrait être réprimée comme de la subversion ou du terrorisme, et ceux qui oseraient encore s’exprimer librement pourraient être extradés en Chine. Le rouleau compresseur chinois s’abat sur les libertés de Hong Kong au mépris total de l’accord signé avec les Britanniques de 1984. Depuis plusieurs semaines, avec des collègues de plusieurs groupes ici au Parlement, nous alertons sur ce sujet, et je voudrais redire ici mon soutien total aux opposants qui avec un courage incroyable se lèvent encore, avec leur seule voix pour arme, face à l’énorme puissance de la Chine. 

Malheureusement, l’Europe ne leur apporte pas le soutien qu’elle leur doit. Notre civilisation a inventé la démocratie, elle reste terriblement silencieuse aujourd’hui. Silencieuse même devant l’intimidation et le mensonge que la Chine lui impose presque ouvertement. Un fait récent, largement ignoré : fin avril, le Service européen d’action extérieure, la « diplomatie » européenne, publie un rapport sur la crise du coronavirus. Trois fonctionnaires affirment que des passages entiers de ce rapport ont été retirés avant publication : ils décrivaient les méthodes de désinformation utilisées par la Chine sur l’origine de l’épidémie. Et ces passages ont été supprimés… sous la pression de Pékin. Les ambassadeurs des 27 Etats membres ont accepté eux aussi de retirer un passage entier d’un texte qu’ils signaient le 6 mai dernier dans un organe de presse chinois, un passage qui indiquait simplement que l’épidémie avait commencé en Chine. Incroyable soumission aux diktats de ce pays… Des pays attachés à leur souveraineté et conscients de leur responsabilité démocratique auraient dû retirer leur texte au lieu de céder à un tel chantage, et de se rendre ainsi complices des mensonges qui piègent aujourd’hui un milliard trois cent millions de citoyens chinois ! 

Pourquoi nos pays sont ils prêts à trahir, à subir, et à se taire ? 

Il y a longtemps que l’Europe cède du terrain. Pour partie par naïveté. Pour partie aussi parce qu’elle y trouve un intérêt matériel évident, à courte vue. Nous avons tous dans nos poches des produits fabriqués en Chine. Le fait évident que la Chine exploite par exemple même le travail forcé dans ses prisons ne nous a pas fait reculer. Je me souviens de ces cartes postales vendues en décembre dernier dans des supermarchés de Londres, dans lesquelles plusieurs acheteurs avaient eu la surprise de trouver des appels au secours de détenus de Shanghaï. Qui leur a répondu ? La chaîne de supermarché a précipitamment retiré les produits, et nous avons continué d’acheter chinois : la conscience européenne se dissout dans le calcul. 

Notre passivité est pourtant non seulement un renoncement moral, mais aussi une erreur stratégique. En France en particulier, nous consommons depuis longtemps maintenant plus que nous ne sommes capables de produire : notre balance commerciale avec la Chine est déficitaire de 30 milliards par an. Cela implique que nous devenons dépendants, et que notre économie est vouée à être progressivement rachetée par des acteurs étrangers. La Chine a développé une stratégie claire de conquête par le commerce, baptisée les nouvelles route de la soie : elle investit en particulier dans les infrastructures de transport dans le monde entier, en Afrique par exemple, mais aussi en Europe. La part des investissements chinois dans ce domaine est passée de 20 % en 2016 à plus de 50 % dans les années suivantes. 5 des 10 ports les plus importants en Europe, qui sont des points d’entrée essentiels dans notre marché, ont été ciblés par des investissements chinois. Avec notre complaisance étonnante : le port du Pirée par exemple, détenu en majorité depuis 2016 par le chinois Cosco Shipping, a reçu 140 millions d’euros de la banque européenne d’investissement l’année dernière… 

La crise actuelle ne va rien arranger bien sûr : elle fragilise beaucoup d’entreprises européennes, qui deviennent ainsi beaucoup plus vulnérables à des stratégies opportunistes de rachat. Dans cette situation, il est urgent de réagir et de sortir l’Europe de sa léthargie. 

Nous devons être prêts à protéger notre tissu industriel, et en particulier nos entreprises stratégiques, et les Etats doivent pouvoir agir pour cela. Habituellement les règles européennes interdisent aux Etats d’intervenir pour soutenir une entreprise : ces règles ont été suspendues pendant cette crise, et nous voulons qu’elles restent suspendues aussi longtemps qu’il le faudra. 

Nous devons retrouver un climat économique plus sain en Europe, mais cela suppose de mettre fin à la concurrence déséquilibrée que nous imposons à nos entreprises, en restant aveugles au contexte mondial. La commission européenne a refusé par exemple la fusion d’Alstom et Siemens l’an dernier, au motif que cette entreprise deviendrait trop importante en Europe. D’accord ; mais alors comment pouvons nous autoriser le géant chinois CRRC, qui bénéficie du monopole en Chine, et qui est largement soutenu par des aides d’Etat dans son pays, à prendre des marchés en Europe ? Il est totalement avantagé par les règles que nous imposons à nos propres entreprises, et qui ne s’appliquent pas à lui ! Je crois à la liberté de l’économie, à condition que les règles soient les mêmes pour tous… Nous ne pouvons sur ce sujet nous en prendre qu’à notre propre naïveté. Il faut que l’Europe soit cohérente ! 

En attendant ce rééquilibrage, face à l’urgence actuelle, notre président de groupe Manfred Weber a fait une proposition que je soutiens totalement : il faut imposer au moins un moratoire d’un an pour empêcher toute entrée chinoise au capital d’une entreprise européenne. Il serait absolument scandaleux que la Chine tire bénéfice de la crise économique mondiale qu’elle a au moins contribué à causer. 

Enfin, pour éviter que l’épidémie ne resurgisse, nous devons exiger une enquête indépendante sur l’origine et la gestion de cette crise sanitaire dans le monde. Cette enquête, nous devons la mener pour dissuader tout Etat à l’avenir de dissimuler une menace globale ; mais nous la devons aussi à la mémoire de tous ceux qui sont morts et pour les familles endeuillées. Nous la devons pour la cause de la vérité, et l’Europe ne sera pas fidèle à son histoire et à sa vocation si elle ne donne pas pour priorité essentielle à sa diplomatie d’imposer cette exigence. Si nous nous renions, si nous ne respectons pas nos propres principes fondamentaux, comment pouvons-nous espérer être respectés ? 

La Chine est un grand pays, héritier d’une histoire exceptionnelle, qui a mûri une civilisation magnifique. Mais avec le parti communiste chinois, qui a imposé et maintenu son pouvoir depuis plus de soixante ans au prix de dizaines de millions de victimes, nous n’avons ni les mêmes intérêts, ni la même idée du monde de demain, ni la même vision de l’homme et de la société. Bien sûr, il ne s’agit pas de traiter la Chine en ennemie ; mais les européens doivent se rappeler d’urgence que l’histoire est faite de rapport de forces, et que préserver la paix et la liberté l’exigent aussi. Le gouvernement chinois assume de défendre ses objectifs et ses principes ; si nous n’en sommes plus capables, nous serons balayés, à un moment où pourtant le monde a besoin plus que jamais des principes de liberté et de dignité absolue de la personne humaine que la civilisation européenne a mûris. » 



 

Les moyens d’agir dans le contexte géopolitique qui se dessine

Sur la chaîne d’assemblage Rafale du site Dassault Aviation de Mérignac

À l’occasion d’un déplacement à Mérignac, dans la Gironde, pour visiter le plus important des sites du groupe Dassault Aviation, où sont assemblés en particulier les différents modèles de Falcon et le Rafale, François-Xavier Bellamy a été interrogé par Jefferson Desport, journaliste spécialiste des questions de défense pour Sud Ouest et TV7 Bordeaux. La création du Fonds européen de défense, dont François-Xavier Bellamy est responsable pour le PPE (en tant que shadow rapporteur), doit permettre d’investir dans cette filière industrielle décisive, « pour notre économie et nos emplois, mais aussi pour retrouver l’autonomie stratégique qu’il nous faut maîtriser si nous voulons pouvoir agir dans le contexte géopolitique qui se dessine. Et nous avons tous les atouts pour cela, si nous voulons nous en donner les moyens : notre pays peut être fier des talents, de l’énergie et des savoir-faire exceptionnels sur lesquels il peut compter, ici comme dans bien d’autres domaines… »

Industrie de défense et autonomie stratégique : entretien avec TV7

(12 minutes)

François-Xavier Bellamy | TV7 – Industrie de défense et Autonomie stratégique

🎙️ Invité de TV7 Bordeaux, pour discuter des enjeux d'autonomie stratégique en Europe, et des perspectives du lancement du Fonds européen de défense, dont je suis chargé du suivi pour le PPE au Parlement européen.

Publiée par François-Xavier Bellamy sur Samedi 7 mars 2020

 

Entretien avec Sud Ouest

(Extraits) […]

La France, l’Allemagne et l’Espagne travaillent à la construction d’un futur avion de combat européen, le Scaf. Un pas vers une défense européenne ?

Parler d’une armée européenne, c’est une illusion. Il s’agit de construire des coopérations qui nous permettront d’être autonomes, du point de vue de nos matériels, par exemple. C’est par le concret que l’Europe peut progresser.

Considérez-vous comme Emmanuel Macron que l’Otan est en  » état de mort cérébrale  » ?

La stratégie de l’Otan manque de cohérence. Mais la forme de cette phrase a rendu inaudible un diagnostic nécessaire. De nombreux pays de l’Est, sous le joug soviétique il y a encore trente ans, sont aujourd’hui défendus par l’Alliance atlantique. Plutôt que donner l’impression qu’on veut leur retirer cette protection, construisons en parallèle les conditions concrètes de notre autonomie stratégique européenne.

Comparé au poids du parapluie américain, c’est un chemin de crête…

Les Américains sont nos alliés, pas nos suzerains. Nous devons créer les moyens de cette autonomie, sans pour autant prétendre écarter l’Otan, sinon nos partenaires européens ne nous suivront pas. La phrase d’Emmanuel Macron a fait reculer notre cause.

Retour sur la session plénière d’octobre 2019 au Parlement européen

 

Ajout (2 décembre 2019) :

Poursuivre la coopération plutôt que le fantasme de l’armée européenne

Tribune du général Bertrand Ract-Madoux et de l’amiral Pierre-François Forissier initialement parue dans Le Figaro à l’occasion de la campagne pour l’élection européenne 2019.

Poursuivre la coopération plutôt que le fantasme de l’armée européenne

Au moment où deux de nos jeunes camarades des forces spéciales viennent de donner leur vie pour sauver leurs compatriotes, nous voulons tout d’abord saluer l’engagement de notre jeunesse au sein des armées françaises et penser à leurs familles et à leurs camarades. Cette situation rappelle l’intensité des menaces auxquelles nous sommes confrontés. Dans ce contexte, l’Union européenne est confrontée à des enjeux stratégiques majeurs: terrorisme, sortie du Royaume-Uni, rôle des États-Unis avec l’Otan… Ces facteurs ont produit des effets certains sur notre sécurité et nourrissent l’urgence d’une clarification européenne en matière de défense. La campagne des élections européennes offre l’occasion d’étudier cet enjeu fondamental.

Il n’est pas imaginable de céder aux fantasmes d’une armée européenne

Tout d’abord, il n’est pas imaginable de céder aux fantasmes d’une « armée européenne », en laquelle aucun expert en matière de défense ne croit… et qu’a pourtant encore proposée Nathalie Loiseau. Les armées, ce sont d’abord des hommes et des femmes prêts à aller jusqu’au… Lire la suite en ligne

 

© Le Figaro