Des éoliennes géantes dans l’estuaire de la Gironde ?

Le site naturel de l’estuaire de la Gironde, dans lequel se trouve le Phare de Cordouan, est actuellement menacé par un projet d’installation de 40 éoliennes géantes de 160 mètres de haut. Des marais uniques, lieux de biodiversité et refuges pour oiseaux migrateurs et animaux, classés « Natura 2000 » risquent d’être détruits définitivement.

Une pétition citoyenne a été lancée pour attirer l’attention des pouvoirs publics sur cette entreprise. Vous pouvez y accéder à ce lien pour la soutenir :

 

ACCÉDER À LA PÉTITION

 

Trois cartes montrant l’emplacement et l’évolution du projet entre 2014 et 2019.

États généraux de l’effondrement

Photo : AP/SIPA – Alexandre GROTHENDIECK

Tribune initialement publiée sur le site du magazine Marianne.

Nous apprenons cette semaine que la France arrive désormais à la dernière place parmi les pays européens pour l’apprentissage des mathématiques. La dernière. Et ce n’est qu’un indice de la situation dans les autres disciplines… Si nous avions encore un peu de lucidité sur l’ordre de priorité des urgences dans notre pays, ce résultat de l’enquête internationale TIMMS, publiée mardi, devrait occuper la totalité de l’attention des médias et de l’opinion publique. Mais non… À peine quelques titres noyés dans les priorités du moment, très loin derrière le covid qui menace nos réveillons et l’annonce par le gouvernement d’un grand « Beauvau de la sécurité »…

À ce rythme-là, nous avons surtout devant nous bien des « Grenelle du déclin », des « Ségur de l’impasse » ou des « États généraux de l’effondrement » : si la France ne se remet pas d’urgence à transmettre à ses enfants les savoirs fondamentaux indispensables à leur avenir, la seule ambition des prochains gouvernements sera d’administrer un déclassement aussi concerté, paisible et convivial que possible. Après tout, notre pays a connu des généraux qui excellaient dans l’art d’organiser la retraite : ce n’est pas rien que de savoir se replier en bon ordre, de sombrer tout en veillant à la bonne application des protocoles. Gérer la débâcle : c’est le but que semble avoir choisi le ministère de l’Éducation nationale. Emblématique de l’impuissance de l’action publique aujourd’hui, il est devenu plus qu’aucun autre le ministère de l’étrange défaite, dans l’ambiance de délitement tranquille et de mensonge généralisé qui a fini par nous conduire à cette dernière place aujourd’hui.

La dernière place. Il faudrait l’écrire en majuscule, tant ce résultat est stupéfiant, et décisif pour notre avenir. Nos élèves sont aujourd’hui, non par leur faute mais par la nôtre, les moins bien formés d’Europe. La France se classe même derrière l’Albanie, le Kazakhstan, l’Azerbaïdjan. Dix points seulement au-dessus de la Macédoine ou de la Géorgie ; mais cent points en-dessous du Japon, de l’Irlande, de la Russie. Inutile d’être bon en calcul pour comprendre que le pays de Descartes, Pascal et Fermat, le pays de Grothendieck, Lafforgue ou Villani, a perdu le sens de la réussite. Il s’agit là d’un classement officiel, publié sur le site du ministère de l’Éducation nationale – il convient au passage de féliciter cette administration qui tient à jour l’inventaire méticuleux de ses reculs successifs.

La dernière place. Il faudrait l’écrire en majuscule, tant ce résultat est stupéfiant, et décisif pour notre avenir.

Mais comment un tel résultat ne produit-il pas un immense coup de tonnerre ? Comment, avec le septième PIB mondial, le plus grand ratio de dépenses publiques par habitant, et le premier budget de l’État consacré à l’éducation, avons-nous pu arriver à cette dernière place ? Dans un pays normal, les pouvoirs publics devraient s’expliquer, le gouvernement aurait à rendre des comptes, les principaux cadres seraient remplacés – dans le public comme dans le privé. Bien sûr, le temps de l’éducation est un temps long, et cette dernière place est le résultat de politiques menées par les gouvernements successifs depuis des années maintenant, gauche et droite confondues, ancien et nouveau monde. Il serait trop facile d’en tirer prétexte pour conclure à l’irresponsabilité générale. Une faillite d’une telle ampleur devrait conduire ceux qui assument le commandement à présenter leur démission – surtout lorsqu’ils occupent les plus hautes fonctions de ce ministère depuis bien longtemps, comme notre ministre actuel… Quand on participe au pilotage de l’éducation nationale depuis quinze ans, comment peut-on ne pas se sentir comptable d’un échec aussi absolu ?

Seulement voilà : nous ne sommes pas dans un pays normal. La seule chose qui compte vraiment, dans la France de 2020, c’est que ça ne fasse « pas de vagues ». Le silence feutré qui a accueilli ces résultats n’est qu’un avatar de plus de cette injonction désormais bien connue, renvoyée depuis trop longtemps aux professeurs qui sur le terrain osaient tirer le signal d’alarme. L’Éducation nationale est passée maître dans l’art d’étouffer les problèmes : les enquêtes internationales qui se suivent montrent toutes l’effondrement du niveau de nos élèves, mais le taux de réussite et de mentions au bac n’a jamais été aussi important. Faute de sauver les enfants, on sauve au moins les apparences. Faute de sauver les professeurs aussi : l’Inspection générale publiait cette semaine son rapport sur l’attentat islamiste contre Samuel Paty. Le rapport s’intitule, euphémisme administratif irréel, « Enquête sur les évènements survenus au collège du Bois d’Aulne ». Les auteurs ont sans doute voulu éviter de pousser jusqu’à « incidents » ou « problèmes » : « évènements » devait suffire. Quant au nom du professeur assassiné, il a été oublié. Au même moment, le ministère publiait une annonce pour recruter un professeur d’histoire dans ce collège… sur le site de Pôle Emploi. Compétence requise : « gestion du stress ». Il ne faudrait pas faire de vagues.

Ce qui se joue, derrière l’effondrement de notre système éducatif, ce sont des vies empêchées, des talents privés des conditions de leur accomplissement, plusieurs générations déshéritées de l’essentiel […]. Et c’est la société que l’on condamne à la déraison commune, les aveuglements d’aujourd’hui préparant les violences de demain. Sur l’inculture prospèrent toutes les formes de barbarie – de celles qui font de dangereuses vagues…

On pourrait énumérer très longtemps les symptômes de ce délitement général ; tellement de faits – qui pour certains feraient presque sourire, tant ils confinent à l’absurde, s’ils n’étaient si graves, au fond. Car ce qui se joue, derrière l’effondrement de notre système éducatif, ce sont des vies empêchées, des talents privés des conditions de leur accomplissement, plusieurs générations déshéritées de l’essentiel ; c’est Fermat qu’on assassine, bien des talents pourtant prêts à prolonger la science autant que la littérature mais qui, privés du savoir indispensable à leur éclosion, ignoreront toute leur vie jusqu’à leurs propres capacités. C’est notre pays démuni des savants, des inventeurs, des découvreurs du futur. Et c’est la société que l’on condamne à la déraison commune, les aveuglements d’aujourd’hui préparant les violences de demain. Sur l’inculture prospèrent toutes les formes de barbarie – de celles qui font de dangereuses vagues… Il est temps de réagir, si nous ne voulons pas sombrer.

 

 

Invité sur le plateau de LCP

https://twitter.com/LCP/status/1333864364844195842

 

L’article 24, symbole du recul inutile de nos libertés

Tribune publiée le 28 novembre 2020 dans Le Figaro. Illustration : Fabien Clairefond pour Le Figaro.

Qui aurait pu penser que la France verrait de nouveau menacées les libertés fondamentales que l’on aurait pu croire acquises pour toujours ? Le débat sur l’article 24 de la loi relative à la Sécurité globale est un symptôme de plus de la dérive que nous suivons. Une fois de plus, on voudrait opposer la liberté à la sécurité – comme si, pour assurer l’indispensable protection de nos policiers et gendarmes, il était urgent de revenir sur le droit de la presse… Une fois de plus, nos gouvernants cèdent à la tentation d’un texte superflu et dangereux offert en cadeau peu coûteux à des forces de l’ordre épuisées, et qui sur le terrain manquent souvent de l’essentiel. Une loi de plus, destinée à rejoindre les milliers de pages d’un droit devenu bavard, redondant, incompréhensible, qui n’arrive plus à empêcher que ceux qui ne nuisent à personne.

Commençons par l’évidence : cet article ne vaudra pas à un seul policier ou gendarme d’être mieux protégé demain. La violence désormais quotidienne qui s’abat sur les forces de l’ordre est le signe que le droit déjà existant n’est simplement pas appliqué. Plus de dix mille policiers et gendarmes ont été blessés en opération en 2018, un chiffre en nette augmentation depuis quelques années. Chaque semaine apporte désormais son lot d’images de commissariats de police attaqués au mortier d’artifice, de gendarmes obligés d’éviter les tirs qui pleuvent jusque sur les logements de leurs familles. Un tel niveau d’agressions en dit long sur le sentiment d’impunité totale qui anime leurs auteurs. Notre droit est supposé réprimer fortement les outrages et la violence envers tout dépositaire de l’autorité publique ; quand la justice n’arrive pas à faire respecter cette règle essentielle, quand la loi reste sans force au point qu’un uniforme suscite trop souvent l’insulte plutôt que la crainte, qui peut croire sérieusement que créer un nouveau délit améliorera quoi que ce soit ? L’urgence absolue est d’appliquer, partout sur le territoire français, les lois déjà existantes. Mais pour cela, encore faudrait-il avoir le courage politique d’agir réellement face à la délinquance… Toute nouvelle gesticulation législative ne peut être qu’une fuite facile, et une insulte aux forces de l’ordre abandonnées à leur sort – à la mémoire de la gendarme Mélanie Lemée, des policiers Eric Monroy et Franck Labois, tués en mission en cette seule année 2020. Qui peut penser sérieusement qu’un texte de plus les aurait sauvés de la violence décomplexée qui leur a retiré la vie ?

Commençons par l’évidence : cet article ne vaudra pas à un seul policier ou gendarme d’être mieux protégé demain. La violence désormais quotidienne qui s’abat sur les forces de l’ordre est le signe que le droit déjà existant n’est simplement pas appliqué.

Cette inventivité réglementaire est d’autant plus absurde qu’elle prétend instaurer une sanction qui, en fait, existe déjà. Le gouvernement explique qu’il s’agit de réprimer le fait de diffuser l’image d’un policier ou d’un gendarme, mais seulement si c’est « dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique ». Or une telle intention de nuire est bien sûr déjà condamnée par la loi de 1881, qui sanctionne, plus lourdement encore que ce nouvel article, toute « provocation à commettre des atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité d’une personne ». Cette disposition existe depuis près de cent quarante ans… Notre droit n’avait pas attendu les effets de manche de M. Darmanin pour condamner ceux qui désignent une cible dans l’intention de lui nuire.

Cette inventivité réglementaire est d’autant plus absurde qu’elle prétend instaurer une sanction qui, en fait, existe déjà.

Une fois de plus, notre vie démocratique est donc occupée par un débat absurde, pour créer une loi inutile, une de plus. Une de trop. Car sans avoir aucune utilité, cet article 24 ne sera pas pour autant dépourvu d’effet – ce qui explique la rare unanimité qu’il a suscitée contre lui de la part des professionnels de la presse. L’ambiguïté de sa rédaction compliquera le nécessaire travail des journalistes, y compris pour assurer que la force publique est employée à bon escient. Il n’y a aucune chance qu’il intimide ceux qui se mettent déjà hors la loi par leurs menaces et leurs attaques ; mais il est certain qu’il encouragera les dérives qui menacent nécessairement, comme nous le constatons encore récemment, tout corps qui assume la responsabilité redoutable d’exercer la force publique. L’immense majorité des policiers et des gendarmes font honneur à leur profession ; pourquoi laisser penser qu’il faudrait les mettre à l’ombre ?

Cet article 24 constitue une étape de plus dans la défiguration de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.

Cet article 24 constitue une étape de plus dans la défiguration de la loi de 1881 sur la liberté de la presse, qui constituait un miracle d’équilibre légal et jurisprudentiel pour garantir la liberté tout en réprimant ses excès. Depuis 1972 et la loi Pleven, un empilement de textes n’a cessé de créer de nouveaux délits, inspirés par un mélange de bonnes intentions et de calculs politiques – les deux pavant tout aussi sûrement le chemin vers le même enfer. La parole et la pensée, la vie médiatique et le débat public, toutes les conditions de la liberté ont été peu à peu asphyxiées par une multitude d’entraves ; avons-nous pour autant gagné en sécurité, en respect, en civilité, en ouverture d’esprit, en douceur et en clarté ? Cela n’a pas empêché l’anathème, la menace et la violence de prendre le pas sur la conversation civique. Cet article 24, à la fois superflu et dangereux, constitue un pas de plus dans nos reculs démocratiques. Il est significatif à cet égard que Matignon ait proposé, pour échapper à ce débat, qu’un énième comité soit constitué pour le réécrire : dans une démocratie en bonne santé, c’est généralement le travail du Parlement…

La parole et la pensée, la vie médiatique et le débat public, toutes les conditions de la liberté ont été peu à peu asphyxiées par une multitude d’entraves ; avons-nous pour autant gagné en sécurité, en respect, en civilité, en ouverture d’esprit, en douceur et en clarté ?

Ces reculs sont partout visibles. Qui aurait pu penser que dans la France de 2020 le gouvernement suspendrait, sans jamais reconnaître clairement la gravité de telles décisions, la liberté d’aller et de venir, le droit de se réunir, l’exercice normal des cultes ? La crise sanitaire, comme la crise sécuritaire, sont des échecs de l’Etat qu’il fait payer aux citoyens, faute d’avoir su rétablir la situation, en revenant sans aucun sens de la mesure sur leur droits fondamentaux. François Sureau l’écrivait il y a quelques mois : aujourd’hui, « les libertés ne sont plus un droit mais une concession du pouvoir ». Il est urgent que la conscience civique se relève face à cette dérive, pour que renaisse une France où il soit de nouveau possible de se parler, de se contredire et de se respecter pourtant, de prier et de dire sa foi, comme de dire ses doutes ou de critiquer un dogme, une France où il soit permis de faire simplement son travail – que l’on soit policier, gendarme ou journaliste, avec la même passion de la liberté, et au service du même bien commun. Ce combat ne se divise pas.

Mayotte, Schengen, séparatisme : entretien à Paris Match

François-Xavier Bellamy à Mayotte

Extraits d’un entretien à Paris Match publié le 26 novembre 2020.

Vous rentrez d’une tournée à Mayotte et vous affirmez qu’aucun développement ne sera possible sans mettre fin aux flux migratoires permanents. N’est-ce pas la politique du gouvernement?

François-Xavier Bellamy. Mayotte est en état d’urgence, face à une situation migratoire hors de contrôle. Malgré l’énergie des équipes qui luttent sur le terrain contre l’immigration clandestine, il faudra des moyens bien plus importants, et une vraie détermination de toutes les administrations, pour éviter d’atteindre un point de rupture. Au fond, Mayotte permet de comprendre le défi qui attend la France dans son ensemble : pour pouvoir reconstruire notre unité, il faut pouvoir mettre fin à notre impuissance sur le front migratoire.

Comment l’Union européenne peut-elle soutenir Mayotte face à ce défi ?

L’Europe a un vrai rôle à jouer sur les sujets migratoires. La Commission doit présenter bientôt son nouveau schéma sur le sujet. J’espère que la réglementation qui sera adoptée mettra enfin un terme à l’idée aberrante sur le plan européen de la relocalisation des migrants : jusqu’à aujourd’hui, la doctrine est qu’en cas de crise migratoire, il faut gérer notre impuissance en se répartissant les migrants entrés illégalement sur le sol européen. Mais cela ne peut être une solution… Le principe qui doit être enfin garanti, c’est que personne ne doit pouvoir s’établir en Europe s’il y est entré illégalement. Ce principe est indispensable pour rétablir la situation, à Mayotte comme pour l’ensemble des pays européens. Ce qu’éprouvent les Mahorais, je l’ai vécu aussi sur l’île de Lesbos, en Grèce : ne pas maîtriser nos frontières n’est pas de la générosité, c’est une impuissance qui prépare toutes les fractures de demain.

Au Perthus, Emmanuel Macron vient de réclamer une refondation des règles de Schengen. Ça va dans le bon sens ?

Enfin ! La droite le demande depuis des années, et je l’ai évoqué tout au long de la campagne européenne, malgré les critiques que cela nous valait. La libre circulation ne peut fonctionner que si nous maîtrisons l’ensemble de nos frontières en Europe. Je suis heureux que le président de la République se rallie à cette perspective. Mais la réalité de son action est malheureusement bien éloignée de sa communication : jamais la France n’a accueilli autant d’immigration légale depuis plus de 40 ans. L’an passé, plus de 300.000 titres de séjour ont été délivrés. C’est un record historique, et un contresens majeur : si on veut empêcher le communautarisme qui fracture notre société, il faut d’urgence mettre un terme à ces flux migratoires massifs. Tout le travail d’intégration, qu’il nous faut rattraper aujourd’hui, sera impossible sans ce préalable. Il faut revenir sur le droit du sol, et suspendre le regroupement familial, que ce gouvernement a à l’inverse étendu aux mineurs isolés. Tant que nous n’agirons pas fermement sur ce sujet, rien ne sera fait dans la lutte contre le « séparatisme ».

Approuvez-vous le projet de loi sur le séparatisme rebaptisé « garantie des principes républicains » ?

Je soutiendrai tout ce qui permettra à la France d’être mieux armée face à la menace islamiste. Mais cette loi me paraît bien éloignée des enjeux. Il suffit de considérer l’improbable pudeur lexicale d’Emmanuel Macron : pourquoi ne pas appeler le danger par son nom ? Samuel Paty n’a pas été décapité par un couteau « séparatiste ». Le faux mineur pakistanais qui voulait s’en prendre à Charlie Hebdo n’était pas animé d’intentions « séparatistes ». Ce qui nous menace aujourd’hui, c’est l’islamisme, qui veut s’imposer par la violence et la terreur. Et pour le combattre, on a moins besoin d’empiler de nouvelles lois que de garantir que d’appliquer celles qui existent. Chaque semaine, des commissariats ou des gendarmeries sont attaqués à coup de mortiers d’artifice, sans que personne ou presque ne soit sanctionné… Commençons par mettre fin à l’impunité et à faire respecter nos lois partout sur le territoire français. Le reste n’est que gesticulation…

Un million de Français auraient basculé dans la pauvreté. Y-a-t-il un risque d’explosion sociale ?

C’est d’abord un drame humain immense. Ce basculement terrible vers la pauvreté doit être pris en compte. Le gouvernement fait ce qu’il peut sur le plan social, mais l’anesthésie des aides publiques ne compensera jamais l’activité perdue, jamais. Il faut absolument tout faire pour que les gens puissent recommencer à travailler et reprendre une vie normale le plus vite possible.

Faut-il rendre obligatoire l’isolement des personnes atteintes du coronavirus ?

Sur ce sujet comme sur bien d’autres, à chaque fois que l’Etat échoue à remplir son rôle, il reporte le poids de l’échec sur les libertés fondamentales des Français. Le vrai problème, ce n’est pas l’isolement des malades, c’est l’échec total de la stratégie de dépistage. L’application gouvernementale supposée servir au dépistage était un échec programmé, dont j’ai averti depuis le début : le résultat est tragique, malgré les sommes investies. Les Français respectent l’isolement quand ils sont testés, mais la stratégie de tests à l’aveugle ne pouvait pas fonctionner. Maintenant le sujet n’est pas de devenir plus répressifs encore, en traitant les malades comme des détenus ! L’urgence est d’avoir enfin une politique de dépistage efficace.

À chaque fois que l’Etat échoue à remplir son rôle, il reporte le poids de l’échec sur les libertés fondamentales des Français.

Est-ce que vous vous vaccinerez contre la Covid ?

Oui, si le vaccin présenté apporte toutes les garanties de sécurité. J’espère surtout qu’on ne manquera pas cette bataille. Au Parlement européen, je vois que nos collègues allemands sont déjà pleinement engagés dans la préparation de la campagne de vaccination, avec une stratégie et une logistique très avancées.

Un Français sur deux hostiles au vaccin, comment l’expliquez-vous ?

La montée de la défiance m’inquiète de manière générale. Nous vivons dans cette « société de la défiance » décrite par Pierre Rosanvallon. Malheureusement, la parole publique a été profondément discréditée par les inconséquences de nos gouvernants. Les mêmes qui nous disaient, il y a quelques semaines, que les masques étaient inutiles voire dangereux, affirment désormais qu’ils sont indispensables… Dans ces conditions, comment faire confiance ? Nous ne mettrons pas fin à cette défiance en la méprisant ou en l’insultant. Seules peuvent redonner du crédit à la parole de l’Etat l’exigence de vérité, de sobriété et de responsabilité.

A la fin, Emmanuel Macron peut-il être le candidat commun de La République en marche et des Républicains ?

Non – ou bien ce sera sans moi ! Je crois au pluralisme en démocratie, à la constance et à la clarté. Emmanuel Macron n’a été convaincant à aucun point de vue, avant même la crise du Covid. Qu’a-t-il fait pour rétablir l’autorité de l’Etat ? Où sont les mesures énergiques pour mettre fin aux flux migratoires qui déstabilisent notre société ? Où sont les mesures pour rétablir nos comptes publics, retrouver des marges de manœuvre et libérer les énergies ? Où est la stratégie pour une transition écologique qui garantisse en même temps la stabilité énergétique, alimentaire, sociale, dans notre pays ? Je n’éprouve aucun plaisir à être dans l’opposition, mais je ne voyais pas de raison de croire au macronisme en 2017 et à l’épreuve des faits il n’y en a pas plus aujourd’hui.

Serez-vous candidat à la primaire ?

Je ferai tout pour contribuer à construire cette alternance, avec le souci de l’unité. On verra bien comment les choses se présenteront.

Je n’éprouve aucun plaisir à être dans l’opposition, mais je ne voyais pas de raison de croire au macronisme en 2017 et à l’épreuve des faits il n’y en a pas plus aujourd’hui.

Les islamistes s’attaquent à ce qu’ils savent être la France.

« Dans cette église, l’islamisme a frappé la France, et ses racines chrétiennes que nos gouvernants voulaient depuis si longtemps oublier. C’est notre civilisation qui est en jeu, notre manière de vivre, notre liberté de conscience, tout ce qui nous a fondés. Pour mener la résistance, les mots ne peuvent suffire, maintenant seuls les actes comptent. Voici déjà quelques priorités concrètes, rappelées depuis longtemps et qui sont désormais une urgence absolue. »

Pour accéder à l’entretien complet, rendez-vous à ce lien.

La liberté d’expression est-elle en recul en France ?

« Présent à la Sorbonne pour l’hommage national à Samuel Paty : l’unité de notre pays est nécessaire pour faire face à l’islamisme. Mais elle ne peut signifier le silence devant les reniements qui nous ont rendus vulnérables. »

Extrait d’un entretien initialement paru sur lepoint.fr, propos recueillis par Jérôme Cordelier.

[…]

En tant que professeur, avez-vous eu à subir du terrorisme communautaire face à vos enseignements ?

J’ai eu l’occasion d’enseigner dans des quartiers où la population musulmane était majoritaire. e n’ai jamais eu l’occasion de me sentir en insécurité ; mais il est vrai que j’enseigne en terminale, et que les difficultés se situent essentiellement à l’échelle du collège, du fait de l’obligation scolaire. Comme beaucoup de collègues, j’ai cependant constaté comment une forme de conditionnement religieux pouvait organiser chez des élèves une défiance de principe à l’égard de l’école de la République. Cette attitude est manifeste quand on aborde l’histoire, la biologie et la philosophie.

Le professeur de philosophie est réputé susceptible de chercher à propager l’athéisme. En abordant des points d’enseignements qui peuvent paraître anodins, vous voyez surgir chez vos élèves des réflexes conditionnés. Dans un sondage récent de l’Ifop, 40 % des professeurs déclarent qu’ils s’autocensurent. Ils savent que, s’ils sont accusés d’islamophobie, l’institution ne les soutiendra pas. La consigne du « pas de vague » fait des ravages. L’idée « d’islamophobie » a fait son œuvre. Beaucoup de professeurs préfèrent baisser les yeux face aux intimidations religieuses.

La liberté d’expression est-elle en recul en France ?

Indéniablement, elle l’est, et elle le sera de plus en plus par la peur qu’installent ces attentats répétés. On ne pensait pas qu’un jour quelqu’un puisse mourir en enseignant. Mais le plus inquiétant est que cette liberté d’expression recule aussi à cause de nos propres règles et lois. Anastasia Colosimo l’a très bien démontré dans son livre Les Bûchers de la liberté en soulignant comment nous avions déstabilisé la belle architecture de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.

Depuis 1972, étape par étape, une succession de textes, comme la loi Taubira sur la mémoire de l’esclavage, a démantelé cette liberté. Au motif de la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et le négationnisme, on a multiplié les corsets et les restrictions. Aujourd’hui, ces belles intentions se retournent contre nous. L’accusation d’islamophobie est une manière de rétablir le délit de blasphème. L’université al-Azhar, autorité suprême de l’islam sunnite, juste après la mort de Samuel Paty, tout en feignant de regretter cet attentat, rappelle son souhait de voir s’instaurer une régulation mondiale afin « d’incriminer la diffamation des religions ». L’islamisme reprend le vocabulaire de l’antiracisme pour s’en prendre à notre liberté ! Je suis sidéré, le mot est faible, que l’on veuille ressusciter en France la loi Avia dite contre la haine, qui voulait pénaliser explicitement les propos islamophobes. Le cours de Samuel Paty aurait pu tomber sous le coup de cette loi ! Elle aurait été utilisée pour instruire les accusations contre lui.

Comment proposer comme remède une loi qui restreint la liberté d’expression et n’est rien d’autre qu’un acte de complaisance à la censure que l’islamisme essaie de nous imposer ? Cette loi Avia a été censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu’elle enfreignait la liberté d’expression, et certains beaux esprits maintenant proposent de modifier la Constitution pour mettre en place ce nouveau carcan ! Cela reviendrait à pénaliser la jeune Mila, Zineb El Rhazoui, Samuel Paty… Critiquer une religion n’a rien à voir avec le racisme. Mettre le doigt dans cet engrenage, c’est renoncer à notre liberté de penser.

Vous qui ne faites pas mystère de votre foi catholique, craignez-vous une stigmatisation des croyants ?

C’est un risque et une inquiétude, en effet. On ferait une erreur en parlant des religions de façon générale, comme si elles posaient un problème global. Le concept de laïcité est né du christianisme, et on ne pourra lui donner sa pleine validité qu’en reconnaissant nos racines chrétiennes. En réalité, notre problème, c’est la rencontre de l’islam avec un monde pétri de christianisme. Notre défi majeur est de lutter contre l’islamisme en associant à ce combat une grande partie des musulmans paisibles qui cherchent à vivre leur foi en étant respectueux de nos lois. C’est pour cela qu’il faut respecter notre liberté d’expression.

L’islamophobie ne tue que ceux qui en sont accusés.

Extraits d’un entretien initialement publiée dans La Croix. Propos recueillis par Audrey Dufour.

La Croix : En s’en prenant à l’école, cet attentat vise-t-il un symbole du modèle républicain ?

François-Xavier Bellamy : […] C’est une attaque contre le modèle français et sa tradition de l’enseignement dans son ensemble. Le modèle de la laïcité est inhérent à la tradition chrétienne. Le terme provient d’ailleurs du vocabulaire ecclésial. L’idée de la laïcité n’est donc pas spontanément comprise par d’autres religions, comme l’islam, et notre défi aujourd’hui est de partager ces principes fondamentaux avec une population marquée par une autre religion, dans laquelle ces principes n’existaient pas.

Quelle réaction attendez-vous après cet attentat ?

Le moment appelle à une fermeté particulière. Nous sommes tous fatigués des marches compassionnelles. Il est temps de réagir. Et pour commencer, de mettre hors d’état de nuire ceux qui posent des cibles. L’islamophobie ne tue que ceux qui en sont accusés ; nous l’avons déjà vécu avec les attaques contre Charlie Hebdo et nous le revivons aujourd’hui.

L’islamophobie ne tue que ceux qui en sont accusés.

Samuel Paty est mort d’avoir été accusé d’islamophobie. Ce terme et les soupçons permanents qu’il fait porter conduisent à la censure, à la menace, puis à la violence et font reculer notre modèle de société. J’attends donc que le gouvernement s’engage pour une dissolution rapide du CCIF, le Collectif contre l’islamophobie en France, qui joue une stratégie d’intimidation délétère.

Du côté de l’éducation nationale, il faut mettre un terme à cette consigne de « ne pas faire de vague », et soutenir les enseignants face aux difficultés qu’ils rencontrent, leur faire confiance. Il aurait dû être réaffirmé très clairement et immédiatement que cet enseignant n’avait commis aucune faute, que la liberté pédagogique était une liberté non négociable.

Vous êtes vous-même enseignant en philosophie, avez-vous déjà ressenti une forme d’insécurité ou d’autocensure dans vos cours ?

Personnellement jamais, mais je sais que c’est que le cas de beaucoup de mes collègues. Je me souviens notamment de l’un d’entre eux qui avait affirmé que le voile ne serait jamais une obligation en France et a été muté après des plaintes de familles. Un discours religieux dans bien des milieux musulmans cherche à susciter la distance avec les institutions de la République, pour interdire aux enfants une confiance envers la France, qui leur est décrite comme une trahison de leur communauté d’origine. […]

Parler de séparatisme revient à se rassurer à bon compte, en s’imaginant des communautés qui font sécession et se replient sur elles-mêmes. Au contraire, les islamistes ont une ambition de conquête.

La loi sur le séparatisme en préparation par le gouvernement vous semble-t-elle suffisante pour répondre à ces problèmes ?

Parler de séparatisme revient à se rassurer à bon compte, en s’imaginant des communautés qui font sécession et se replient sur elles-mêmes. Au contraire, les islamistes ont une ambition de conquête par la violence et la censure, pour détruire nos libertés et imposer à tous le silence. Quand Jean-Michel Blanquer dit que cet acte est « inqualifiable », c’est faux. Le vrai nom de ce qui est arrivé c’est le terrorisme islamiste ; parler de séparatisme, c’est une nouvelle version du déni qui condamne la République à reculer depuis trop longtemps. Pour faire face à la violence, il faut la nommer et la combattre.

Crédit photo : Daina LE LARDIC / EP 2020

Sur l’interdiction de l’instruction à domicile (IEF)

Sur France Inter le 11 octobre 2020

Au sujet de la perspective d’interdiction de l’enseignement à domicile (IEF : instruction en famille).

« Parce que l’État n’arrive pas à remplir son rôle, il voudrait aujourd’hui rogner les libertés fondamentales des Français [dont l’IEF] pour pouvoir éviter la catastrophe qu’il ne parvient pas à gérer. Que l’État remplisse son rôle ! Qu’il contrôle les résultats de l’instruction, c’est déjà une règle aujourd’hui. »

IEF, Covid-10, « séparatisme », immigration, plan de relance européen, etc. : pour voir l’émission complète avec tous les sujets abordés, rendez-vous à ce lien.

En métropole ou au milieu du Pacifique

Dimanche aura lieu un événement dont l’importance est trop souvent passée sous silence : la Nouvelle-Calédonie votera pour décider de son avenir. Notre passé, lui, nous relie de manière indissoluble : nous avons vécu ensemble bien des jours heureux et bien des épreuves, et je ne doute pas que nous ayons encore plus de pages à écrire de cette grande histoire commune. Nos aînés ont travaillé côte à côte, ont mené les mêmes combats, ont pour beaucoup donné leur vie au nom d’une seule et même patrie. La Nouvelle-Calédonie n’est pas un territoire lointain que les hasards de l’histoire auraient associé à la France, elle n’est pas dominée par la France, ni même protégée par elle : elle est la France. Et c’est ensemble que nous pourrons faire face à tous les défis qui nous attendent, résister avec le même esprit de liberté aux menaces qui, en métropole ou au milieu du Pacifique, entourent notre pays ; c’est ensemble que nous pourrons retrouver, avec le sens de ce qui nous unit, la confiance et l’espérance dont la France peut partout dans le monde rayonner de nouveau demain.

Cette unité n’exige pas que soient méprisées l’histoire et la singularité des territoires qui font la France, bien au contraire : la Nouvelle-Calédonie doit être assurée du respect de la nation pour cette terre unique au monde et pour tous ceux qui l’habitent, pour ceux qui nous ont précédés, pour les coutumes qu’ils ont léguées et qui sont l’âme de l’archipel. Dans une région où la Chine montre chaque jour plus clairement qu’elle rêve d’écraser toute singularité qui oserait lui résister, la France doit retrouver son unité, non par l’oppression et l’uniformisation, mais par l’adhésion et la liberté.

Ce dimanche 4 octobre, amis Calédoniens, allez voter pour témoigner de notre immense espoir commun !


Voir aussi (edit décembre 2021) :
Réunion publique en simultané depuis Nouméa et le Parlement européen