Agir comme si un bien était possible

Entretien paru initialement sur le site du Point.

« Le temps est à la grande inquiétude », écrivez-vous. Pourquoi, dans ce cas, intituler votre livre Espérer ?

Parce que nous avons tellement besoin de retrouver une espérance… Cela suppose de commencer par refuser la facilité de l’optimisme, qui n’est qu’une forme d’irresponsabilité. Nous avons aujourd’hui peu de raisons d’être optimistes pour l’avenir. Mais c’est paradoxalement le bon moment pour espérer : car l’espérance consiste à regarder lucidement la réalité, et à agir comme si un bien était possible même quand tout fait croire le contraire.

C’est paradoxalement le bon moment pour espérer : car l’espérance consiste à regarder lucidement la réalité, et à agir comme si un bien était possible même quand tout fait croire le contraire.

Georges Bernanos écrit en 1942, dans un article qui sera publié plus tard dans les Essais et écrits de combat : « Le pessimiste et l’optimiste s’accordent à ne pas voir les choses telles qu’elles sont. L’optimiste est un imbécile heureux. Le pessimiste est un imbécile malheureux. » L’optimiste considère que, quoi qu’il arrive, tout finira par s’arranger ; le pessimiste, par croire que tout finira par s’écrouler. Dans les deux cas, il est inutile d’agir… Aucune de ces deux attitudes ne me semble le signe d’un véritable courage.

Attentats, épidémies, dérèglement climatique, guerre en Ukraine, en Arménie, en Israël… La politique se réduit-elle aujourd’hui à la gestion de crises ?

En réalité, notre fragilité se trouve d’abord dans la crise intérieure que traversent notre continent et le monde occidental. L’Europe comme la France ne savent plus dire qui elles sont ; elles ont oublié leur vocation. La guerre en Ukraine, par exemple, a été rendue possible par la passivité européenne face au retour de la brutalité géopolitique perceptible depuis longtemps, et en particulier, j’en suis convaincu, du silence de nos institutions pendant la guerre de 2020 contre le peuple arménien. Pendant si longtemps, l’Europe a privilégié ses intérêts matériels de court-terme sur les principes qu’elle devait défendre et sur sa propre sécurité. C’est de cette faiblesse que viendra le danger qui menace déjà notre continent.

Vous avez dénoncé la campagne sur la « liberté dans le hijab » lancée par le Conseil de l’Europe, estimez que la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour de justice de l’Union européenne entravent la capacité des Etats à endiguer les flux migratoires… L’Union Européenne est-elle vraiment le bon échelon pour agir ?

Oui, d’abord parce qu’il y a des combats à y mener, ne serait-ce que pour lutter contre ces dérives inquiétantes. J’ai fait adopter en effet un amendement pour interdire à la Commission européenne de financer les publicités qui, en pleine révolte des femmes iraniennes, affirmaient que « la liberté est dans le hijab » ; c’est un combat symbolique mais que je crois essentiel, pour faire reculer l’entrisme islamiste dans nos pays, et pour que l’Europe soit ainsi fidèle à sa propre mission. Mais nous avons mené aussi des batailles sur des enjeux décisifs sur le plan économique, industriel, social… Nous avons obtenu une première vraie mesure de protection du marché européen, à travers le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, qui va redonner de l’oxygène à nos entreprises, tout en faisant de notre marché intérieur, avec ses 650 millions de consommateurs le plus grand levier mondial dans la décarbonation des pays tiers. C’était notre premier engagement en 2019, et une réalité depuis le 1er octobre dernier.

Pendant si longtemps, l’Europe a privilégié ses intérêts matériels de court-terme sur les principes qu’elle devait défendre et sur sa propre sécurité. C’est de cette faiblesse que viendra le danger qui menace déjà notre continent.

« Plus le mal commis est grand, plus le pardon est difficile, mais plus il peut être grand », notez-vous à la suite de Jankélévitch. Les massacres commis par le Hamas en Israël sont-ils pardonnables ?

Le temps n’est pas à cette question, mais au deuil, et à l’urgence de protéger la population d’Israël. Le combat qui s’engage n’est pas une vengeance, c’est une opération nécessaire pour détruire le danger, et qui doit être menée selon les règles d’un engagement armé. Contrairement au Hamas, qui est une organisation terroriste, le but de l’armée israélienne n’est pas de tuer des civils, mais de frapper des cibles militaires avec le moins de victimes collatérales possibles.

La question du pardon se posera en son temps. L’histoire du peuple juif porte avec elle cette immense et difficile question des limites du pardon : la Shoah est la matérialisation du mal absolu à partir duquel se pense la possibilité de l’impardonnable. D’un premier texte publié en 1948, au Pardon paru en 1967, Jankélévitch change lui-même de position : il finit par affirmer qu’il n’est rien qui ne puisse être pardonné. Mais c’est l’effet d’un long chemin et d’un temps incompressible, qui doit être respecté. Et personne ne peut parler au nom des victimes.

La France Insoumise refuse de qualifier le Hamas d’organisation terroriste. Ce mouvement sort-il, ce faisant, du « champ républicain » ?

Il sort en tous cas du champ de la dignité élémentaire. La fuite de Mathilde Pano, qui quitte le micro en conférence de presse pour ne pas qualifier le Hamas d’organisation terroriste, est irréelle… Cette position me révolte ; mais il me semble que la réponse ne peut consister à interdire par le droit une faillite qui est d’abord politique et morale. Il faut d’abord la combattre, précisément, sur le plan de la politique et de la morale, par les arguments de la démocratie libérale : l’intelligence, la logique, la démonstration sans concession.

La position [de La France Insoumise] me révolte ; mais il me semble […] qu’il faut d’abord la combattre, précisément, sur le plan de la politique et de la morale, par les arguments de la démocratie libérale : l’intelligence, la logique, la démonstration sans concession.

L’affaiblissement des Républicains s’explique-t-il d’abord par un manque de travail conceptuel, ou par un rétrécissement sociologique ?

La vie démocratique en général s’est affaiblie, en devenant l’exercice d’agréger des clientèles plutôt que l’effort de proposer une vision au pays. Le dernier vote qui a réuni les Français au-delà des clivages sociaux, c’est celui de 2007 : des ouvriers votaient pour Nicolas Sarkozy, et il y avait une bourgeoisie urbaine à gauche… Aujourd’hui, la politique tend à se réduire à de la sociologie, et même à de la géographie. Si nous voulons refonder le débat démocratique, et reconstruire la droite, nous ne devons pas retrouver une clientèle, mais une vision. La nomination par Eric Ciotti d’Emmanuelle Mignon comme vice-présidente des LR chargée du projet, le développement de la direction des études et le lancement d’un média vont dans le bon sens pour cela.

Pourquoi vouloir à nouveau conduire la liste des Républicains aux européennes après votre score décevant de 2019 (8,4%) ? Est-ce de l’obstination ?

Le score était décevant, c’est vrai, par contraste avec la dynamique de la campagne ; rappelons qu’on nous promettait 6 à 8 % avant que je devienne candidat. Ce résultat était déjà le signe de la faiblesse que vivait notre famille politique, concurrencée par les illusions du macronisme. Je suis convaincu que nous pouvons saisir l’occasion des prochaines européennes pour nous relever, et ce qui est essentiel, retrouver la perspective d’une alternance pour le pays. Si je suis choisi pour mener cette campagne à nouveau, je serai heureux de m’engager dans cette bataille, pour rendre compte du travail accompli et des résultats obtenus pendant ces cinq ans, et pour pouvoir les poursuivre avec plus de force encore. Le mandat qui viendra sera décisif : sur l’industrie, l’énergie, l’immigration, les enjeux géopolitiques, la France et l’Europe sont à la croisée des chemins.

L’extrême gauche tente d’excuser l’inexcusable, jusqu’à Strasbourg.

Ne pas savoir nommer le mal.

À l’occasion de la seconde session plénière d’octobre 2023 a été voté l’ajout à l’ordre du jour d’un débat sur les attentats terroristes en Europe. Des élus de gauche proposaient au Parlement européen une discussion sur « les attaques terroristes contre les écoles en France ».

Mais ces crimes naissent-ils par accident ? Ne pas savoir nommer l’islamisme, c’est ne pas pouvoir le combattre. François-Xavier Bellamy est intervenu au nom du groupe PPE pour que le titre du débat mentionne effectivement le terme.

Excuser l’inexcusable absolu

Quelques jours plus tard avait lieu un débat sur la guerre Israël-Hamas, en amont du vote d’une résolution du Parlement européen sur le même sujet… Nouvelle intervention de François-Xavier Bellamy, devant l’attitude de nombreux députés de groupes de gauche ou d’extrême-gauche.

« Israël est frappé en plein cœur, et nos pays endeuillés à répétition par le terrorisme islamiste. Mais il est maintenant clair que des élus de gauche ont choisi de trouver des excuses à l’inexcusable absolu… Glaçante compromission avec la pire des menaces. »

Mayotte a soif. Et que deviennent les fonds européens qui devaient permettre d’investir ?

François-Xavier Bellamy est intervenu en session plénière du Parlement européen pour alerter de nouveau sur le manque d’accès à l’eau à Mayotte et dans certaines régions de pays de l’UE, après plusieurs interventions en réunions de commission, et pour appeler les gouvernements des États-membres à agir enfin.

« Mayotte a soif.

Dans un département français, dans un département d’Europe, il y a aujourd’hui des habitants qui ne peuvent pas ouvrir le robinet plusieurs heures par jour, plusieurs jours par semaine. Des habitants qui ne peuvent pas boire l’eau qui coule du robinet sans craindre pour leur santé. Il y a aujourd’hui un département français où les enfants doivent être soignés parce qu’ils sont tombés malades pour avoir bu de l’eau supposée potable. C’est la réalité de la situation que vivent aujourd’hui nos concitoyens.

Et chers collègues, ce ne sont pas seulement les Mahorais, mais ce sont aussi les habitants de la Guadeloupe, de la Martinique, de nos outre-mer. Et c’est dans beaucoup de territoires de nos pays aujourd’hui, un véritable défi que celui qui consiste à faire en sorte que tous les citoyens aient accès à ce qui n’est pas un bien parmi d’autres, mais le bien le plus essentiel, l’eau – le plus nécessaire à la vie.

L’Union européenne verse des aides au développement massives, y compris dans cette région du monde. Mais où sont passés les fonds européens qui étaient supposés faire en sorte d’offrir à Mayotte les moyens de désaliniser l’eau ?

L’Union européenne verse des aides au développement massives, y compris dans cette région du monde. Mais où sont passés les fonds européens qui étaient supposés faire en sorte d’offrir à Mayotte les moyens de désaliniser l’eau ? Aujourd’hui, à la fin du mois d’octobre, les réserves en eau de Mayotte pourraient être complètement vides et les habitants doivent payer une eau hors de prix, et en payant simultanément leurs factures plutôt que de pouvoir compter sur l’eau qu’ils pourraient produire.

Chers collègues, nous n’avons pas attendu pour nous saisir de cette question. Depuis plusieurs semaines, le Parlement alerte sur ce sujet, mais nous attendons maintenant des actes de nos gouvernements de l’Union européenne pour sortir de cette situation intenable. »

L’Europe a renoncé à nommer ses racines

Entretien publié dans le Figaro le 5 octobre 2023

Propos recueillis par Alexandre Devecchio

 

A. Devecchio – Votre nouveau livre, Espérer, se présente comme un cours de philosophie. Il est par ailleurs inspiré par le cours de philosophie que vous donnez en public deux fois par mois depuis dix ans dans un théâtre parisien, cette année au théâtre Édouard VII. Malgré votre emploi du temps chargé de député européen, vous avez choisi de poursuivre cette aventure. Pourquoi ? Votre formation de philosophe nourrit-t-elle et inspire-t-elle votre action politique ?

F-X. Bellamy – La crise politique actuelle vient d’abord de ce que, dans la vie publique, plus rien ne semble avoir de sens : la communication a remplacé le réel, la dernière polémique écrase les débats de fond, les mots même sont dévitalisés. Dans un tel moment, la philosophie est sans doute un antidote. En nous obligeant à exercer notre raison, à rompre avec la facilité du relativisme, à affronter les questions essentielles, elle conduit à choisir de nouveau les principes qui peuvent fonder une action juste et féconde.

C’est une grande chance pour moi de poursuivre, en parallèle de mon engagement politique, cette expérience incroyable des Soirées de la philo, avec les milliers de spectateurs qui les ont suivies depuis dix ans. Je suis toujours aussi impressionné de les voir dans ce théâtre comble, qui sortent de leur journée de travail, de leurs préoccupations quotidiennes, pour écouter Platon et Aristote, Montaigne, Pascal… Pour moi le premier, nos rendez-vous du lundi soir sont une respiration essentielle.

Votre livre commence par cette phrase lourde de sens, « le temps est à la grande inquiétude ». La France et l’Europe traversent-elles une crise existentielle ?

Comment ne pas la voir ? Le premier signe de cette crise, c’est l’incapacité à reconnaître ce que nous sommes, ce que nous avons reçu, et à le transmettre. Jérôme Fourquet soulignait la semaine dernière dans vos colonnes que la France n’a plus de récit partagé qui puisse l’unir : cela vient d’abord de cette rupture intérieure. L’Europe a renoncé à nommer ses racines. La France a élu président un candidat qui expliquait qu’il n’y a pas de culture française. Nous ne savons plus dire ce qui nous relie, ce à quoi nous appartenons. Cette désaffiliation transforme les contradictions inhérentes à la vie civique en confrontations sociologiques, géographiques, communautaires. Et cette conflictualisation de la démocratie condamne l’action publique à l’impuissance, aggravant encore la crise du politique.

La crise écologique, les nouvelles défis géopolitiques ou les grands bouleversements migratoires n’ont rien d’insurmontable en soi, et la France aurait des ressources décisives pour leur apporter des réponses fortes ; notre faiblesse ne vient que de nous-mêmes, et de cette crise existentielle en effet que nos gouvernants ne cessent d’aggraver.

Votre livre s’intitule pourtant Espérer… Quelles sont les raisons d’espérer ? Pourquoi faites-vous une différence entre optimisme et espérance ? L’optimisme affiché de beaucoup d’hommes politiques est-il une forme de déni ?

Cette distinction me semble cruciale en effet, et pas seulement pour des raisons théoriques. L’optimisme consiste à affirmer par principe que quoiqu’il arrive, tout finira bien. C’est une sorte de passage obligé, presque une convention sociale : même quand tout indique que la situation est grave, il faut faire profession d’optimisme. C’est ce déni de réalité déguisé en enthousiasme qui a fini par rendre désastreux les problèmes que nous vivons depuis si longtemps. Une telle attitude ne peut conduire en effet qu’à l’inaction et l’irresponsabilité, exactement comme le pessimisme qui n’en est que le double inversé : si vous croyez que l’avenir sera forcément radieux, ou tragique quoiqu’il arrive, pourquoi faudrait-il s’engager, s’efforcer, se fatiguer ?

On peut facilement confondre l’optimisme et l’espérance, mais en réalité rien n’est plus opposé. Espérer, c’est reconnaître l’ampleur de l’adversité et pourtant ne pas reculer ; c’est, même quand le pire semble certain, engager sa vie sur la possibilité du meilleur. En ce sens, paradoxalement, le moment qui appelle le plus grand acte d’espérance, c’est celui qui offre le moins de raisons d’espérer. Dans son histoire, la France a survécu plusieurs fois par de tels actes d’espérance.

La submersion de Lampedusa a confirmé l’ampleur de la crise migratoire. L’Union européenne est-elle à la hauteur de cette crise ?

Non. La situation à Lampedusa n’a malheureusement rien d’inédit, elle ne fait que rendre visible les arrivées massives d’immigrés illégaux qui durent depuis des années maintenant. Pour y mettre fin, il faut repenser toute la politique européenne à partir de ce principe très simple : personne ne doit pouvoir s’établir durablement dans un pays européen s’il y est entré illégalement. Le droit d’asile est totalement dévoyé par le fait qu’il suffit de le demander, une fois arrivé en Europe, pour y rester indéfiniment, même si la procédure vous déclare inéligible.

Cette situation est la clé du business des passeurs. Il faut renverser cet état de fait : hors de situations où une crise frappe immédiatement à nos frontières, on ne doit pouvoir demander l’asile qu’à l’extérieur de l’Europe, et ne pouvoir entrer que si on y a été autorisé. C’est la condition pour que nos Etats retrouvent la maîtrise de leurs frontières, et que plus une seule personne ne se noie en mer Méditerranée.

Les décisions successives de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), entravent la capacité des États à endiguer les flux migratoires… Le 21 septembre la CJUE a notamment jugé illégal les contrôles à la frontière franco-italienne. Faut-il quitter ces institutions ? Pensez-vous vraiment qu’elles soient réformables ?

Reconnaître la légitimité du pouvoir judiciaire ne signifie pas accepter cette dérive qui a vu l’exécutif se défaire de sa responsabilité et se mettre entièrement dans la main du juge

Nous le disons depuis longtemps : il faut rétablir l’équilibre indispensable à la séparation des pouvoirs. Reconnaître la légitimité du pouvoir judiciaire ne signifie pas accepter cette dérive qui a vu l’exécutif se défaire de sa responsabilité et se mettre entièrement dans la main du juge. C’est la raison pour laquelle, avec les groupes Les Républicains à l’Assemblée et au Sénat, nous avons déposé un projet législatif complet sur l’immigration comprenant une réforme constitutionnelle : sans recourir à ce levier pour reprendre la main sur les cours suprêmes dont la jurisprudence n’a cessé de s’étendre, nous ne verrons aucun changement substantiel de notre politique migratoire.

Mais en parallèle de ce travail si nécessaire, il faut quand même rappeler que l’essentiel de l’immigration dans notre pays est constituée d’entrées légales : le gouvernement a délivré l’an dernier près de 320 000 titres de séjour, un record absolu, à des ressortissants de pays non européens (Royaume-Uni inclus) ; c’est l’équivalent de la population de la ville de Nantes. Et cette fuite en avant ne dépend pas d’abord des contraintes européennes… C’est d’abord la lucidité et la volonté politique qui manquent pour y mettre fin.

Sur fond de guerre en Ukraine, la question de l’énergie est redevenue centrale… Or le système européen de formation des prix provoque l’explosion des tarifs de l’électricité en France. Là-aussi faut-il sortir du marché européen de l’électricité ?

Il faut sortir des effets aberrants de ce marché, en effet ; et c’est à cela que nous travaillons depuis de longs mois. Le marché de l’électricité est particulier, puisqu’il faut produire à chaque instant le volume d’énergie consommée par le réseau, qui varie selon les besoins. Pour cela, le prix de l’électricité est de fait lié au prix du gaz, qui sert généralement à compléter la production. Il faut retenir cela d’ailleurs : plus nos Etats installent d’énergies intermittentes comme les éoliennes ou les panneaux solaires, plus nous aurons besoin de gaz ou de charbon, comme l’Allemagne, pour équilibrer les besoins du réseau… C’est un contresens absolu.

La conséquence, c’est que même si les coûts de production de l’électricité nucléaire, qui constitue 70% du mix électrique français, ont peu évolué, les prix de toute l’électricité pour les Français ont eux explosé avec ceux du gaz. La solution, c’est de faire sortir l’essentiel de l’électricité commercialisée du marché européen, en redonnant la possibilité de contrats longs termes. C’est un sujet très technique, mais en même temps politiquement majeur : de là dépend le niveau de vie des ménages en France, autant que la performance des entreprises et la possibilité même de réindustrialiser le pays. Nous travaillons sans relâche sur cette priorité absolue, et j’espère que nous atteindrons notre but avant l’hiver prochain.

A neuf mois de la fin de son mandat, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen a dressé son propre bilan. Que pensez-vous de celui-ci ?

Si nous rendons la vie impossible à ceux qui travaillent en Europe, tout en laissant nos marchés ouverts, nous n’aurons pas sauvé la planète, nous aurons seulement offert des avantages compétitifs aux producteurs des pays tiers, qui ne partagent rien de nos scrupules environnementaux

J’ai eu l’occasion de le lui dire en face lors de sa dernière intervention au Parlement : l’Europe se dévitalise par l’excès des normes, des contraintes, des taxes imposées à ceux qui produisent dans nos pays, au nom d’une “transition écologique” qui nous conduit dans l’impasse. Si nous rendons la vie impossible à ceux qui travaillent en Europe, tout en laissant nos marchés ouverts, nous n’aurons pas sauvé la planète, nous aurons seulement offert des avantages compétitifs aux producteurs des pays tiers, qui ne partagent rien de nos scrupules environnementaux. Et nous nous serons rendus plus dépendants encore des puissances étrangères qui nous vendent ce que nous ne savons plus produire… C’est cette dépendance qui entraîne par exemple le silence infiniment coupable de l’Union européenne sur le crime commis par Aliyev contre le peuple arménien dans le Haut-Karabakh : l’idéologie anti-nucléaire de la Commission européenne est celle-là même qui la contraint aujourd’hui à mendier un peu de gaz azerbaïdjanais, au prix des vies arméniennes, et de l’honneur de l’Europe.

L’Allemagne semble favorable à un resserrement de l’étau budgétaire en Europe. Craignez-vous le retour de l’austérité ou pensez-vous qu’il faut faire des économies ?

La rigidité du pacte de stabilité européen avait sans doute ses défauts ; mais quand je regarde la trajectoire budgétaire de la France, ce qui m’inquiète le plus, ce n’est pas le retour de l’austérité : c’est plutôt l’aggravation du déni de réalité ! Notre pays est le seul en Europe à n’avoir fait aucun effort pour se désendetter. Notre dette publique se creuse encore, alors que l’Etat n’a jamais ponctionné autant de prélèvements obligatoires ; pourtant tous les services publics essentiels s’effondrent – hôpital, école, justice…, et l’investissement public reste faible. Le résultat ne peut être qu’une aggravation de la situation : avec la remontée des taux, sur laquelle j’alerte depuis des années comme bien des économistes, la charge de la dette va redevenir bientôt le premier budget de l’Etat, devant l’éducation nationale.

Quand un pays emprunte à ses petits-enfants de quoi payer ses fonctionnaires chaque mois, et même de quoi payer la dette qu’il leur transmet, c’est qu’il est économiquement, politiquement, moralement très malade. Et il y a quelque chose d’ironique à voir Bruno Le Maire s’en inquiéter soudain, lui qui a les clés de Bercy depuis 2017… Rappelons que, en matière de dette, le pire des budgets de François Hollande était plus raisonnable que le meilleur budget d’Emmanuel Macron. Nous payerons cher, et longtemps, le délire des dernières années en matière de finances publiques ; et pour ma part, je ne ferai jamais confiance à ceux qui ont organisé la faillite du pays pour assurer son relèvement.

Aux prochaines élections européennes, vous pourriez affronter à votre droite Jordan Bardella et Marion Maréchal… Qu’est-ce qui vous distingue de ces deux candidats ? 

Une différence essentielle, c’est que je ne suis pas candidat. Peut-être le serai-je demain, mais pour l’instant l’essentiel est d’assumer mon mandat jusqu’au bout, avec pour seule boussole de servir la France et les Français dans les débats majeurs qui nous attendent ces prochains mois, sur les questions migratoires, industrielles, géopolitiques… Un mandat dure cinq ans ; c’est déjà bien court pour agir. Il serait irresponsable d’en retirer une année décisive pour en faire de la politique politicienne. C’est apparemment le choix de certains, pour qui seul compte l’étiquette partisane ou la réélection personnelle. Quand nous avons voté il y a quelques jours sur la réforme majeure du marché de l’électricité, alors que le scrutin pouvait se jouer à quelques à voix près, Jordan Bardella était absent : chacun ses priorités. Pour ma part je travaillerai jusqu’au bout ; puis viendra le temps de la campagne, et nous aurons à rendre des comptes, pour mieux préparer l’avenir. J’y suis prêt !

Peut-on changer l’UE de l’intérieur ?

Extrait d’un entretien paru dans  le magazine La Nef en septembre 2023.

[…]

Être député européen a-t-il changé votre vision de l’Europe ?

J’ai évidemment beaucoup appris, mais je ne crois pas avoir changé radicalement de perspective. Je continue de penser que l’Union européenne est aujourd’hui le synonyme d’une forme de dépossession pour les citoyens des pays européens, dépossession de leur capacité à maîtriser leur destin. Et je crois qu’elle devrait au contraire trouver tout son sens dans le fait de les rendre plus libres et plus maîtres de leur avenir. Pour y parvenir, il faut qu’elle connaisse une remise en cause extrêmement profonde.

Justement, fort de cette expérience de député, pensez-vous qu’un homme politique puisse changer les choses de l’intérieur dans le cadre de l’Union européenne ?

Oui : je n’ai pas le sentiment d’avoir passé mon mandat, comme beaucoup de mes collègues d’autres groupes politiques, à consentir ou à commenter ; ce qui rend le mandat au Parlement européen intéressant, c’est qu’avec du travail et la patience qu’il faut pour construire des alliances, il est possible d’agir. Nous avons mené, et parfois gagné, des batailles majeures. Sur l’énergie nucléaire par exemple : nous avons empêché l’asphyxie de la filière nucléaire française par les règlements sur la taxonomie, et je crois pouvoir dire que j’y ai contribué de façon très directe, quand bien même tout le monde me promettait une défaite. On a parfois le sentiment d’assister, impuissants, à la déconstruction de la civilisation sur laquelle l’Europe est pourtant fondée : là aussi, nous avons réussi à mettre des crans d’arrêt importants. Je pense à l’amendement que j’ai déposé – il aura fallu s’y reprendre à plusieurs reprises, c’est toujours dans la durée qu’on gagne les combats – pour interdire à la Commission européenne de financer des campagnes faisant la promotion du hijab. Au-delà du combat contre cette dérive très concrète, cette victoire a permis de renverser une tendance : beaucoup m’ont partagé que, dans les cabinets des commissaires européens, une vigilance est désormais de mise sur le choix de leurs interlocuteurs, de leurs partenariats et leurs engagements. Tant mieux si nous avons pu faire que l’inquiétude change de camp !

Je n’ai pas le sentiment d’avoir passé mon mandat, comme beaucoup de mes collègues d’autres groupes politiques, à consentir ou à commenter ; ce qui rend le mandat au Parlement européen intéressant, c’est qu’avec du travail et la patience qu’il faut pour construire des alliances, il est possible d’agir.

Ces sujets sont essentiels, mais il faudra évidemment des ruptures beaucoup plus profondes pour changer significativement l’Union européenne. Et c’est une grande difficulté de l’engagement politique dans notre monde : on a parfois l’impression que nos victoires consistent surtout à éviter le pire, à ralentir la crise. On mène des combats de retardement, on essaie de combler des brèches et d’empêcher que le bateau ne coule trop vite. Ce n’est pas sans importance, bien sûr ; mais pour changer profondément de direction, il faudra plus que le travail parlementaire quotidien.

Que faudra-t-il alors, concrètement ? Qu’est-ce qui pourrait être réalisé pour changer cette Union européenne ?

Je crois que nous aurons d’abord besoin d’une véritable alternative politique en France. Car l’Union européenne est surtout conduite par les États-membres. Le Parlement européen n’est pas à l’initiative. C’est d’ailleurs le caractère un peu éprouvant de cette expérience : on reçoit des textes qui nous viennent déjà écrits par la Commission et dont les États membres ont eu l’initiative. Quand les Français se plaignent de l’Europe, ils doivent se souvenir qu’ils se plaignent d’abord de l’Europe que construit le gouvernement français. Et donc si nous rebâtissons une véritable alternative politique pour notre pays, nous pourrons faire en sorte que les choses changent structurellement au niveau européen.

Vous parliez tout à l’heure de l’importance pour un député de pouvoir agir et pas simplement consentir ou commenter. À cet égard, est-il important qu’il y ait une délégation française au PPE – et donc très concrètement des parlementaires LR au Parlement européen ?

Je crois que c’est fondamental, même si les Français ne sont pas forcément conscients de ces enjeux. Les Républicains appartiennent au PPE, qui est la première formation politique européenne. Il y a donc une équation électorale qui rend le vote LR spécialement utile, même si cela ne saurait suffire à fonder un vote.

Le débat européen a complètement ignoré la fin des clivages rêvée par Emmanuel Macron ; il est toujours structuré autour d’un clivage gauche-droite qui va se renforçant. Tendance par exemple accrue par l’actuel rapprochement du PPE avec les forces conservatrices, par exemple avec le parti Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni, avec lequel il discute aujourd’hui pour construire un vrai pôle politique qui puisse demain être majoritaire au niveau européen. Il est absolument clé que la France puisse être représentée dans ce qui est, dans ce qui va être le lieu de l’action politique la plus efficace et la plus influente. Et, par contraste, force est de constater que nos collègues du Rassemblement national par exemple, dans la mécanique des votes internes au Parlement, qui est aussi le résultat de leurs propres choix politiques, n’ont pas fait adopter un seul amendement en cinq ans, ni un seul texte. Ils n’ont pas gagné une seule bataille dans l’enceinte du Parlement européen.

Les Républicains appartiennent au PPE, qui est la première formation politique européenne. Il y a donc une équation électorale qui rend le vote LR spécialement utile, même si cela ne saurait suffire à fonder un vote.

Mais encore une fois, on ne peut pas demander aux électeurs de raisonner avec des calculs d’efficacité. Car je ne crois pas qu’une majorité d’entre eux se déterminera en se disant, comme Machiavel : où est le plus grand effet de levier possible ? De plus, c’est à nous de leur présenter une ligne politique claire à laquelle adhérer, à nous de faire en sorte qu’ils soient convaincus, pour pouvoir être représentés là où cela compte vraiment de l’être.

[…]

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Promesse tenue : contre la GPA, une étape essentielle franchie au Parlement

Promesse tenue au Parlement contre la GPA

Belle victoire ce 6 octobre : la proposition que François-Xavier Bellamy a déposée, avec le soutien de plusieurs collègues, pour interdire la gestation pour autrui (GPA) dans toute l’Union européenne, a été adoptée par une majorité de voix, de droite comme de gauche. Une étape essentielle pour la dignité des plus vulnérables. La prochaine phase est celle de la négociation interinstitutionnelle, dite aussi « trilogue ».

Une étape essentielle pour la dignité des plus vulnérables.

Le Figaro en parle

« Nous verrons comment la France se positionne sur le sujet au Conseil… », indique l’eurodéputé LR au Figaro. « Aujourd’hui, la GPA est illégale en France ; théoriquement, cette ligne devrait être soutenue », poursuit-il. « Si, au Parlement européen, le texte a été soutenu par le groupe socialiste, notons que les socialistes français, et certainement une partie de la macronie, ne sont pas sur cette ligne. Je ne sais donc pas ce que fera le gouvernement au Conseil sur ce sujet. J’espère qu’il le soutiendra », ajoute celui qui est pressenti pour conduire la liste des Républicains aux élections européennes de juin 2024.

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Summum jus, summa injuria : à propos de l’arrêt de la CJUE sur le contrôle des frontières

Intervention de François-Xavier Bellamy au Parlement européen le 4 octobre 2023 à l’occasion du débat sur le futur « Pacte asile et migration ».


« Le 13 septembre, 120 bateaux débarquent à Lampedusa. En quelques heures, des milliers de personnes entrent illégalement sur le sol européen.

Le 21 septembre, la Cour de Justice de l’Union européenne répond au Conseil d’Etat français : un État-membre n’a pas le droit de refouler hors de ses frontières une personne qui cherche à les franchir illégalement. Avant d’envisager une éventuelle expulsion – tenez-vous bien –, il faut laisser un délai à l’intéressé pour quitter volontairement le territoire national. Le seul droit qui reste à nos États est donc de prier poliment les gens de ne pas franchir illégalement leur frontière ; et quand ils les franchissent par milliers, – 330 000 l’an dernier selon Frontex –, il nous reste la possibilité de les inviter à ne pas rester. Chers collègues, ce n’est qu’une preuve de plus que le droit européen s’est retourné contre le droit. Summum jus, summa injuria : le maximum de la procédure, le maximum de la complexité, le maximum de la jurisprudence, atteint le maximum de l’injustice.

Summum jus, summa injuria : le maximum de la procédure, le maximum de la complexité, le maximum de la jurisprudence, atteint le maximum de l’injustice.

Injustice contre les victimes des réseaux de passeurs, qui ont fait de l’impuissance européenne la clé de leur business sordide.

Injustice contre les citoyens de nos pays, dont les démocraties sont privées de tout moyen de décider de qui elles accueillent ou non, et de maîtriser leur destin.

Injustice contre la loi elle-même parce que cette injustice en matière migratoire fait du monde entier une zone de non-droit.

Cher collègues, Monsieur le Commissaire : il est urgent de remettre le droit à l’endroit. »

À propos d’un débat annulé

En juillet dernier, M. Thierry Mariani, député européen du Rassemblement national, a vivement attaqué notre délégation à propos d’une résolution du Parlement européen sur le Liban. Il accusait Les Républicains d’avoir voté en faveur d’un texte qui imposait au peuple libanais de subir encore longtemps la crise causée par la présence sur son sol de millions de réfugiés syriens. J’ai répondu à cette accusation en montrant qu’elle était fausse, et plus grave encore, que nous avions travaillé pendant plusieurs semaines pour éviter précisément ce que M. Mariani avait laissé faire en brillant, comme de coutume, par son absence dans les batailles parlementaires concrètes où se décide l’orientation des textes.

Suite à cette polémique, le média Livre Noir nous a proposé de débattre ensemble en public au cours d’un événement organisé ce soir, 30 septembre, au Cirque d’hiver. J’ai immédiatement accepté, et M. Mariani en a fait de même. J’attendais ce débat avec beaucoup d’intérêt ; mais à ma grande surprise, il y a quelques jours, les organisateurs de l’événement m’ont contacté pour m’informer d’un changement : M. Mariani était toujours d’accord pour débattre, mais à condition qu’il ne soit pas question du Liban, ni par ailleurs de l’Arménie ou de l’Azerbaïdjan… Pour ma part, j’ai répondu que la seule condition de mon côté était qu’il n’y ait pas de condition ; que je voulais bien que toutes les questions soient abordées, même celles qui pourraient sembler difficiles ou dérangeantes ; mais qu’il était absolument impossible d’accepter par principe que le crime terrible que subit le peuple arménien soit ignoré une fois de plus, ou qu’on évite de parler de la crise du Liban, au motif que M. Mariani serait trop lâche pour assumer ses mensonges, ses silences, ou ses amitiés.

Incroyable mais vrai : M. Mariani a préféré se défiler quand il a su qu’il ne lui serait pas possible de fuir ces questions. Malgré cela, j’ai indiqué que je maintiendrais ma participation si un membre du RN assumait de le remplacer : apparemment il ne s’en est trouvé aucun qui ait assez de courage pour cela. Ce débat n’aura donc pas lieu.
Je prends le temps de vous raconter cette histoire, pour deux raisons : d’abord pour dire à ceux qui participeront à cet événement que je suis désolé de cette annulation bien involontaire ; il est important de tenir ses engagements, et il me semblait donc nécessaire de vous rendre compte, comme les organisateurs le feront j’espère, de la cause pour laquelle ce rendez-vous ne sera pas honoré.

Chers amis qui cherchez une droite enfin claire, intègre et loyale, exigez toujours d’aller au-delà des apparences.

La seconde raison est plus importante : cet épisode qui pourrait paraître anecdotique est en réalité tellement révélateur… Je sais bien que le parti auquel j’appartiens traîne avec lui la défiance accumulée par les déceptions qui ont marqué sa longue histoire ; et je vois combien certains jouent de cette colère accumulée depuis longtemps. Mais chez bien des élus qui se battent aujourd’hui à nos côtés, je vois plus de droiture, de courage, de volonté de servir, que dans la médiocrité si symptomatique que cette histoire manifeste, parmi tant d’autres épisodes. Chers amis qui cherchez une droite enfin claire, intègre et loyale, exigez toujours d’aller au-delà des apparences. Soyez conscients que les vitrines les plus attirantes peuvent cacher les cuisines les plus inavouables ; que ceux qui, par exemple, revendiquent bruyamment de sauver les chrétiens d’orient, sont capables de demander en ce moment qu’on passe sous silence l’Arménie et le Liban… Et si le RN vous séduit avec la promesse du renouveau, rappelez-vous qu’il donne vos voix à des élus qui n’assument rien, ni leurs choix, ni leur bilan, ni leurs soutiens, ni leurs mensonges.

Des sanctions contre l’Azerbaïdjan, maintenant.

Intervention de François-Xavier Bellamy en réunion spéciale de la commission des affaires étrangères du Parlement européen, ce matin, après l’envoi, la veille avec Bruno Retailleau, d’une lettre au Président de la République.

« Chers collègues,

Nous sommes à l’heure terrible des conséquences.

Et ces conséquences, elles sont payées par le peuple arménien aujourd’hui, qui, dans le Haut-Karabakh, est victime d’une opération militaire, parce que le silence de l’Europe et du monde occidental au cours des derniers mois, malgré toutes les transgressions de l’Azerbaïdjan, n’a fait qu’inciter Aliyev à aller encore plus loin. Personne ne peut nier qu’aujourd’hui, ce qui est violé, c’est le droit international le plus élémentaire, le droit humanitaire. Personne ne peut faire comme si l’essentiel n’était pas en jeu.

Et maintenant, il est temps de sortir de cette passivité, quand l’Azerbaïdjan prétend mener une opération antiterroriste et est en réalité en train de tuer des enfants, des femmes, des civils innocents. Il est absolument nécessaire que nous passions des condamnations – unanimes ici, et c’est tant mieux – à l’action.

Il faut des sanctions contre le régime d’Aliyev. Pas dans une semaine, pas dans quelques jours. Maintenant. Dans les heures qui viennent.

Il faut dénoncer le contrat gazier honteux qui nous lie à l’Azerbaïdjan. Pas dans quelques jours. Maintenant.

Et cela seul peut empêcher que le pire se présente à nous. Car le pire, c’est l’épuration ethnique qu’Aliyev veut organiser, qu’il a dit vouloir organiser. Chers collègues, l’Union européenne est née sur l’expérience d’un génocide. Le peuple arménien a déjà subi un génocide. C’était en 1915 et aujourd’hui, ceux qui sont en train de s’attaquer au Haut-Karabakh ne mènent pas seulement une guerre territoriale : ils attaquent un peuple qu’ils veulent faire disparaître, qu’ils veulent rayer de l’histoire. Et pourquoi ? Parce que ce peuple est lié à la civilisation européenne, par son héritage, par sa culture.

Il faut des sanctions contre le régime d’Aliyev. Pas dans une semaine, pas dans quelques jours. Maintenant. Dans les heures qui viennent. Il faut dénoncer le contrat gazier honteux qui nous lie à l’Azerbaïdjan. Pas dans quelques jours. Maintenant.

Est-ce que nous allons rester silencieux ? Est-ce que nous nous contenterons de grandes déclarations ? Est-ce que nous allons voir, à nouveau, le Conseil et la Commission poursuivre une forme d’aveuglement volontaire, mettre les deux parties sur le même plan ? Si nous continuons ainsi, chers collègues, nous serons responsables devant l’histoire de ce que nous aurons laissé commettre.

Et ce sera la trahison la plus grave que l’Europe puisse faire contre elle-même. »


 

Europe et immigration : débat avec Darius Rochebin

François-Xavier Bellamy était l’invité de Darius Rochebin dimanche 17 septembre sur LCI, pour débattre, suite à la crise qui a touché Lampedusa, de la politique migratoire en Europe.